Un policier de Seine-Saint-Denis a été mis en examen pour homicide volontaire, après avoir tué un homme, délinquant multirécidiviste, le week-end dernier. La polémique monte autour de ce dossier et de la légitime défense, à un peu plus d’une semaine du premier tour de la présidentielle.

Alors que le parquet parle d’une « balle entrée à l’horizontale », une source policière de Seine-saint-Denis confirme, grâce aux premières constatations d’enquête, que la balle a ricoché sur un obstacle, avant de toucher mortellement Amine Bentounsi dans le dos.

Course-poursuite

Que s’est-il réellement passé le samedi 21 avril à Noisy-le-sec ? Ce soir-là, le commissariat de Noisy-le-Sec reçoit un appel anonyme leur indiquant la localisation d’un individu recherché par la police.

À leur arrivée sur place, le fugitif jette une grenade « inerte ou à plâtre » avant de prendre la fuite. S’ensuit une course-poursuite à pieds avec l’un des policiers pendant que le chauffeur du véhicule de police, connaissant la topographie des lieux, bloque une issue.

C’est à ce moment qu’Amine Bentounsi, se serait retranché entre deux voitures avant de braquer un revolver à 6 coups de calibre 35 en direction du policier à pieds. Ce dernier aurait fait usage de son arme à quatre reprises en situation de légitime défense, selon lui. L’arme de la victime a été retrouvée avec le barillet plein.

La balle a ricoché

L’avocat du policier Me Merchat, qui veut faire appel de sa mise en examen, affirme que « le projectile a ricoché ».

Une source policière confirme cette version des faits au regard des premiers éléments constatés par les enquêteurs du SDPJ de Bobigny. « La balle n’a pas été droit au but, c’est un éclat de balle qui a touché la victime, la balle a dû ricocher ».

Homicide volontaire ou involontaire ?

Est-ce que la victime tentait de fuir au moment des tirs ? Est-elle morte l’arme à la main ?

Impossible de confirmer l’une ou l’autre hypothèse pour le moment. Si la première peut étayer la thèse du parquet, la deuxième permettrait sans aucun doute de requalifier les faits en homicide involontaire.

Excès de zèle

C’est d’ailleurs le sens de la colère des policiers qui manifestent depuis le début de semaine à Paris et en province, comme à Nantes ou Rennes. Le ministre de l’Intérieur, Claude Guéant espérait hier que le parquet fasse appel de la qualification de la mise en examen pour un motif qu’il juge « malheureux ».

« La mise en examen est normale, tempère ce policier, c’est la qualification d’homicide volontaire qui relève d’un excès de zèle de la part du parquet. »

Un multirécidiviste connu mais dehors

Quant à la victime, les policiers savaient qu’elle « était recherchée puisque son signalement venait d’un appel anonyme, donc elle a été balancée, mais on ne connaissait pas son pedigree », indique cette même source.

Et c’est l’autre motif de revendication des forces de police. Recherché pour ne pas avoir regagné la prison de Châteaudun (Eure-et-Loir) après une permission de sortie en juin 2010, le fugitif avait été condamné à onze reprises, notamment pour des faits de vols avec arme.

Dysfonctionnement du système judiciaire et pénitentiaire

Ce policier de la PJ de Seine-saint-Denis regrette de voir qu’« il disposait d’une fiche de recherche, mais il n’était pas inscrit sur Objectif », le fichier prioritaire de la police nationale, permettant notamment à des services comme la brigade de répression du banditisme (BRD) de s’emparer du dossier.

« Il a été condamné à 10 ans en 2007 et était déjà autorisé à sortir. Il y a un dysfonctionnement du système judiciaire et pénitentiaire, tout le monde le sait, mais personne ne peut y répondre. Les juges d’application des peines croulent sous les dossiers. S’il n’y avait pas eu ce dysfonctionnement, il ne serait pas mort. »

Antoine VICTOT.

Que dit la loi ?

Les règles de légitime défense sont identiques pour les policiers et les gendarmes qui sont soumis au même régime général mais les seconds peuvent utiliser leurs armes après sommation « dans le cadre d’un régime complémentaire et spécifique ».

Selon le règlement général d’emploi de la police, l’usage de l’arme « est assujetti aux règles de la légitime défense et aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur ». L’article 122-5 du code pénal est la référence pour les policiers et les gendarmes : « n’est pas pénalement responsable la personne qui, devant une atteinte injustifiée envers elle-même et autrui, accomplit, dans le même temps, un acte commandé par la nécessité de la légitime défense ».

Les gendarmes, militaires, sont cependant assujettis à l’article L2338-3 du Code de la Défense à un régime dit complémentaire : il prend en compte les « menaces » pour « déployer la force armée ». Le texte dit aussi – ce qui n’est pas le cas pour les policiers – que lorsque les personnes invitées à s’arrêter par des appels répétés de « halte Gendarmerie » […] cherchent à échapper à leur garde « il peut y avoir usage de la force armée ».

http://www.ouest-france.fr/actu/actuDet_-Policier-mis-en-examen.-La-balle-n-a-pas-touche-directement-la-victime_39382-2071103_actu.Htm
(merci à Cat Aclysme)