« Je vais dire la vérité. 100% la vérité. » Le tribunal se suspend aux lèvres de Mohammed Douik. Va-t-il reconnaître avoir grièvement blessé à coups de couteau deux hommes, dont un policier, voici un an boulevard Barbès (XVIIIe)? Nouvelle déception, à la 14e chambre correctionnelle, après plusieurs longues heures d’audience : « Le téléphone portable, je l’ai volé, c’est vrai.

Mais je n’ai frappé personne. » Soupir des parties civiles.

Henry-Antoine Mayembo et Dany Reis, lieutenant affecté à la police des transports, ont pourtant failli perdre la vie ce dimanche 8 mai 2011. Le premier se fait dérober son téléphone portable vers 23 heures à la station de métro Barbès par un jeune Irakien sans papiers, Mohammed Douik, capuche rabattue sur les yeux… Le second vole à son secours et tous deux se lancent à la poursuite de l’homme jusque sur le boulevard. Alors que pleuvent sur eux les coups de couteau, un groupe compact d’une centaine de personnes s’est formé, composé, notamment, de vendeurs à la sauvette qui peuplent le quartier.

Les caméras prouvent leur présence

« L’atmosphère était très hostile, explique Henry-Antoine Mayembo. Personne n’a cherché à prévenir les secours, à nous aider. Bien au contraire : des hommes haranguaient la foule. » A quatre reprises, un couteau s’abat sur le policier, grièvement blessé à l’abdomen, et son protégé, qui parviendront miraculeusement à trouver refuge dans un fast-food. Tous deux en sont certains : Mohammed Douik est l’homme qui les a frappés. Tout comme Henry-Antoine Mayembo est convaincu que les quatre hommes, algériens et marocains, qui entourent Douik dans le box des détenus étaient bel et bien présents le soir de la terrible agression : tous ont été reconnus par la victime et la plupart figurent en effet sur les images de vidéosurveillance de différents établissements. Tous sont en détention depuis près d’un an et nient avec la dernière énergie, par la voix de leurs interprètes, avoir agressé les deux hommes et défendu Mohammed Douik que Dany Reis tentait d’interpeller.

L’ombre d’un doute plane sur la salle d’audience : « N’avez-vous pas fait arrêter ces personnes dans l’affolement et la crainte de voir le policier ne pas survivre à ses blessures? insiste le substitut du procureur à l’adresse d’Henry-Antoine Mayembo. Vous étiez sous le choc… Il y avait beaucoup de monde. » L’intéressé ne bouge pas d’un iota. Les prévenus non plus : « Je suis innocent! » clame l’un. « Je vendais des cigarettes et j’ai simplement regardé la scène », martèle un autre. « J’ai tenté de leur venir en aide, justement », s’indigne un troisième. « Moi, j’étais là par hasard. Je voulais visiter le Sacré-Cœur », ose le dernier, sans esquisser un sourire.
Mais les faits sont têtus : les images de vidéosurveillance prouvent seulement que la plupart d’entre eux étaient bel et bien sur les lieux, ce qu’ils ne nient d’ailleurs pas. Une porte ouverte pour la défense des cinq hommes qui s’engouffre dans la brèche, tentant de mettre à mal le témoignage des victimes. Les réquisitions devaient être prises tard hier soir.

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