Vendredi 4 mai: environ 200 policiers en civil manifestent devant le palais des congrès, porte Maillot, à Paris. Ils s’engagent dans l’avenue de la Grande-Armée, avec comme objectif la place de la Concorde – mais sont bloqués par les cordons de gendarmes mobiles. Pendant ce temps-là, tous les directeurs du ministère de l’intérieur, sauf Bernard Squarcini, des hauts responsables de la Préfecture de police, des membres du cabinet de Claude Guéant et des responsables syndicaux sont réunis Place Beauvau.

Réunion de crise sur la grogne des policiers, sporadique mais bien réelle depuis le 25 avril? Non, pot de départ de Nicole Tricart, la patronne du pôle ressources humaines à la direction générale de la police nationale. Chez les hauts fonctionnaires, seul Jean-Louis Fiamenghi, le directeur de cabinet du préfet de police, a parcouru ensuite les quelques centaines de mètres qui séparaient les deux évènements.

Le décalage vient confirmer l’ambiance de fin de règne qui s’est installée dans les hautes sphères policières. Autre signe, la nomination du commissaire divisionnaire Emmanuel Bordeau au poste de sous-préfet à Saint-Nazaire (Loire-Atlantique), le 20 avril, à la veille du premier tour de la présidentielle. Le conseiller social du ministre, l’une des pièces maîtresses de son cabinet, avait pourtant obtenu le poste d’attaché de sécurité intérieure à Washington. Mais la prise de fonction était pour le deuxième semestre 2012, et beaucoup de choses pouvaient se passer d’ici-là… Le poste à Saint-Nazaire, lui, était à saisir immédiatement. La rapidité de son départ a surpris chez ses interlocuteurs: Emmanuel Bordeau a participé à la réunion improvisée avec les syndicats, le 25 avril au soir, après la manifestation de policiers de Seine-Saint-Denis sur les Champs-Elysées, puis il a filé.

Le ministre s’est ainsi privé de son conseiller social au lendemain du déclenchement d’une crise…. Plus globalement, le cabinet affiche désormais 14 membres. En mai 2011, ils étaient 20.

TITULARISATIONS

Avant le second tour, un certain nombre de situations personnelles ont également été pérennisées par décrets, le 26 avril. Alain Gardère, préfet délégué à la sécurité à Marseille, a été titularisé au rang de préfet. Plus de risque pour lui de revenir à son grade d’origine, commissaire divisionnaire, s’il est écarté de son poste. Même chose pour Bruno Beschizza, secrétaire national de l’UMP, conseiller régional d’Ile-de-France et candidat aux législatives en Seine-Saint-Denis, qui a été titularisé comme sous-préfet. En 2010, sa nomination comme sous-préfet hors cadre, en pleine campagne des régionales, avait créé la polémique.

Laurent Borredon

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