Beaucoup des conseillers de l’ancien ministre, dont il était proche, étaient absents lors de la passation de pouvoir jeudi matin.
Il n’y a pas eu d’applaudissement. Pas un seul. Claude Guéant a rejoint la voiture qui l’attendait dans la Cour de la place Beauvau dans un silence pesant, serrant au passage la main de quelques uns de ceux qui furent ses plus proches, notamment le préfet de police de Paris Michel Gaudin. Puis il s’est installé à l’arrière de la voiture. Et les grilles du ministère se sont refermées après son passage.
C’est à une bien curieuse passation de pouvoir qu’ont assisté jeudi matin les journalistes et les personnels de l’Intérieur. Certes, les formes et l’esprit républicains ont été respectés à la lettre. Claude Guéant ainsi que l’ex-ministre aux collectivités locales Philippe Richert patientaient depuis quelques minutes déjà sur le perron de l’entrée principale du ministère quand, à 11 heures tapantes, Manuel Valls, a fait son entrée, remontant à pied la longue allée pavée qui sépare la grille de Beauvau de l’hôtel particulier. Tous les grands directeurs de l’Intérieur étaient là, comme le veut la tradition républicaine. Mais, curieusement, beaucoup des conseillers du ministre, dont il était si proche, manquaient à l’appel.
A l’arrivée de Valls, Guéant a descendu les quelques marches du perron pour l’accueillir. Les deux hommes ont échangé une poignée de main sans grande chaleur, prolongée à la demande des photographes. Puis ils se sont entretenus une vingtaine de minutes dans le bureau qu’occupera dorénavant le député-maire d’Évry (Essonne), avant que ne soient présentés à Valls les grands directeurs de la police et de la gendarmerie.
Valls a multiplié les critiques en creux
Après leur entrevue, les deux hommes ont fait un bref discours. Visiblement ému de quitter un ministère auquel il a «donné l’essentiel de (sa) vie professionnelle» Guéant a rendu hommage à la «loyauté» qui anime les personnels du ministère et adressé ses «vœux de succès» à Valls. «Nos options politiques ne sont pas les mêmes mais nous partageons la volonté de servir nos concitoyens» a déclaré l’ex-préfet en retraite, qui fut aussi directeur général de la police nationale.Valls a ensuite pris la parole. Il s’est montré très offensif, multipliant les critiques en creux sur les prises de position de son prédécesseur. «Il n’y aura ni angélisme, ni course effrénée aux chiffres, ni stigmatisation de communautés, d’une catégorie par rapport à une autre, notre pays a besoin de tempérance et de mesure, les Français vivent une période difficile» a ainsi martelé le ministre.
Classé à la droite de la gauche, Valls a tenu à assurer que «la République est partout, dans chaque ville, dans chaque village, dans chaque quartier pour que ses règles et ses principes soient les mêmes pour tous et pour chacun». «J’y veillerai» a-t-il ajouté. Puis, le nouveau ministre de l’Intérieur est revenu sur son histoire personnelle, celle d’un enfant espagnol, naturalisé français en 1982. «Pour celui qui n’est pas né en France, qui est devenu français, qui a appris à aimer ce pays, ses valeurs, sa devise, sa culture, sa langue, son drapeau, devenir ministre de l’Intérieur, cela montre bien que ce pays est un pays un peu à part (dont) il faut souligner davantage la force et les atouts» a-t-il souligné.
http://www.lefigaro.fr/politique/2012/05/17/01002-20120517ARTFIG00564-silence-de-plomb-pour-la-sortie-de-gueant-de-la-place-beauvau.php#!