Les habitants de Krasnoufimsk, petite ville à l’est de Moscou, en ont encore le sang glacé.Même condamnée depuis lundi à vingt ans de prison, la tueuse en série Irina Gaidamachuk leur fait encore peur. Ce serial killer en jupons a été jugé responsable des assassinats de dix-sept retraitées, des meurtres commis entre 2002 et 2010, huit années pendant lesquelles elle a échappé à la police.

Pommettes saillantes, chevelure brune, Irina est une belle slave à la silhouette élancée lorsqu’elle s’installe dans cette région de l’Oural à la fin des années 1980. Dans cette petite ville industrielle où elle vit sans emploi avec son mari et ses deux enfants, l’alcool ronge peu à peu son quotidien et son physique. Quand les services sociaux lui retirent son aîné, elle bascule dans le crime.

Au début, elle ne planifie pas vraiment. Le premier meurtre est sauvage et amateur, mais très vite elle rode son scénario et repère ses cibles plusieurs jours avant de passer à l’acte. Toutes ses victimes sont âgées, la plus jeune a 61 ans, la plus vieille 89. « C’est l’assistante sociale », lance-t-elle en frappant à la porte de sa proie. Une fois entrée, Irina abat sa victime à coups de marteau ou de hachette pour des sommes parfois dérisoires. Pendant que la retraitée, crâne fendu, gît dans son sang, elle fouille l’appartement. « Elle agissait avec cynisme sur des femmes seules pour leur voler leurs économies prévues pour leur enterrement », précise le comité d’enquête.

Si la vieille dame n’est pas à son domicile lorsque la tueuse sonne, elle laisse un mot, fixant un rendez-vous. Des traces qui, pendant des années, n’arriveront pas à être exploitées. Avant de quitter la scène du crime, elle prépare un incendie, ou une explosion en ouvrant le robinet de gaz, ou encore en mettant un fer à repasser en marche…

Très vite, les autorités s’inquiètent de l’existence d’un tueur en série. Un portrait-robot est dressé, placardé partout en ville. Même si la police est persuadée, devant la violence des faits commis, que le criminel est un homme déguisé sous une perruque blonde, toutes les descriptions qui leur reviennent correspondent à une femme. D’où son surnom : la Blonde au marteau. Les Russes, férus de littérature, l’affublent aussi d’un « Raskolnikov en jupon », du nom d’un fameux personnage de Dostoïevski dont l’obsession est de « tuer la vieille ».

La traque dure plusieurs années, les enquêteurs sont sur les dents, les vieilles dames vivent terrorisées. Plus de 3 000 personnes sont interrogées, plus de 400 documents saisis et la plupart des blondes de la région sont auditionnées. L’une d’elles finira même par avouer des crimes qu’elle n’a jamais commis et les policiers qui ont extorqué ces aveux seront d’ailleurs condamnés.

C’est en 2010, lorsque Irina tue une femme de 81 ans, que des témoins mettent enfin la police sur sa trace. A son arrestation, sa famille tombe des nues. « J’ai vécu quatorze ans avec elle et je ne me suis jamais douté de rien », confiera, accablé, son mari à la presse russe. « Je ne peux pas le croire. Elle était une mère douce et gentille », confirme une amie. Irina Gaidamachuk confesse tous ses meurtres. Décrochée de toute réalité, elle dit avoir tué pour pouvoir être une « mère normale ». « J’avais besoin d’alcool et mon mari Youri refusait de me laisser boire », tente-t-elle de justifier.

Lundi dernier, dans le box des accusés, la Raskolnikov féminine, âgée de 40 ans, est apparue les épaules arrondies, le visage bouffi et le regard vide. Elle a été condamnée à vingt ans de prison, en dessous des vingt-cinq encourus.

Le Parisien

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