La famille d’une femme gendarme de 32 ans qui s’est suicidée le 24 septembre 2011 dans son appartement de la caserne de Lyon, selon l’enquête conduite par le parquet, a déposé plainte contre X pour “homicide volontaire” et “harcèlement moral”, a-t-on appris mercredi auprès de son avocat.

Cette plainte avec constitution de partie civile, qui fait suite à une plainte simple déposée fin octobre, entraîne la désignation d’un juge d’instruction qui peut choisir de mener l’enquête, de “refuser d’informer”, de se déclarer incompétent ou de juger la plainte irrecevable.
LA THÈSE DU SUICIDE “HÂTIVEMENT AVANCÉE”

Les proches de la jeune femme estiment que la thèse du suicide, “hâtivement avancée”, reste “difficilement explicable” au vu de la personnalité de la fonctionnaire, et rappellent qu’elle intervient dans un contexte professionnel “pour le moins particulier”. A l’appui du chef “d’homicide volontaire” qu’il propose, l’avocat de la famille, Me David Metaxas, s’étonne “qu’aucun témoin ne se soit manifesté” alors que le coup de feu mortel a été tiré dans la caserne, et insiste surtout sur le “tempérament affirmé, combatif et déterminé” de la jeune femme.

Selon une source judiciaire, l’enquête a cependant révélé que les appartements mitoyens étaient vides lors du décès, survenu dans la nuit de vendredi à samedi. Et d’après les sonomètres posés chez les voisins pendant la reconstitution, “un tir à bout touchant” était moins audible qu’une porte claquée. Par ailleurs, la gendarme a été retrouvée avec un “taux d’alcoolémie élevé”, a appelé son avocat de l’époque dans la nuit pour lui dire qu’elle allait très mal, et a laissé un mot visant un de ses responsables, “Merci à G… le connard”, a précisé la même source.

Selon la source judiciaire, la fonctionnaire faisait par ailleurs l’objet de deux procédures : l’une pour usage frauduleux de fichiers après avoir renseigné une amie de sa mère sans nouvelles de sa fille, et l’autre pour “abus d’autorité” après avoir brièvement placé en garde à vue une adolescente sans en avoir le droit.

“HARCÈLEMENT MORAL”

Mais l’essentiel de la plainte est consacrée aux accusations de “harcèlement moral”, évoquant des “actes répétés d’intimidation, d’injures à connotation raciste souvent”, dont la dénonciation se serait heurtée à l’inertie de la hiérarchie, selon Me Metaxas.

Peu après le décès, l’Association de défense des droits des militaires, qui revendique 1 500 adhérents, avait révélé que Myriam Sakhri l’avait contactée à deux reprises “pour lui faire part de sa souffrance morale qui résultait de son travail”.

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