Le choc est immense à Collobrières, petit village du Var. Deux femmes gendarmes ont été tuées par arme à feu dimanche soir alors qu’elles intervenaient pour une affaire de vol dans cette bourgade de près de 2 000 habitants.
Un suspect, interpellé vers 3 heures du matin, a reconnu être l’auteur des coups de feux, a indiqué le procureur de Toulon, Xavier Tarabeux, lundi dans l’après-midi. D’importants moyens avaient été mobilisés pour retrouver le meurtrier, après ce drame qui constitue une première dans l’histoire de la gendarmerie.
Il était sorti de prison en septembre
Condamné par le passé pour infraction à la législation sur les stupéfiants et vols avec violences, cet homme de 30 ans était sorti de prison en septembre, après six mois d’incarcération. La semaine dernière, il avait été condamné à une peine de sursis-mise à l’épreuve pour violences commises sur sa mère.Selon les premiers éléments de l’enquête, le suspect a tiré dans un premier temps deux coups de feu sur Audrey Berthaut, maréchal des logis-chef de 35 ans, mère de deux filles de 5 et 13 ans, un fait considéré comme «un meurtre». Puis il a poursuivi sa collègue, Alicia Champlon, une adjudante de 29 ans, et tiré six balles dans sa direction, a souligné le procureur, qui, dans ce second cas, a retenu «une volonté de donner la mort par préméditation, donc l’assassinat».
Des constatations effectuées par la police technique et scientifique, qui étaient toujours en cours lundi matin, ont permis de relever notamment des traces de griffures et des résidus de poudre sur les mains du tueur présumé.
«J’allais fermer les volets et là j’entends crier : “Oh non pas ça !”»
Selon les premiers éléments, tout a commencé dans la journée de dimanche par le vol du sac à main d’une habitante de Collobrières par l’auteur présumé des coups de feu. Celui-ci aurait été aperçu ivre en début de soirée, selon le patron de l’un des trois bars du village, interrogé par l’AFP. Le mari de cette habitante frappe alors à la porte du voleur présumé, que lui ouvre sa compagne, et alors que les deux femmes gendarmes arrivent sur les lieux. S’ensuit alors une rixe assez violente, durant laquelle, après avoir frappé et donné des coups de pied dans la tête de la gendarme mère de famille, le suspect lui subtilise son arme de service, un Sig Sauer de calibre 9 mm, et tire. L’autre gendarme s’enfuit alors, le suspect lui court après et la tue également, avant de prendre la fuite à pied avec sa concubine et d’être arrêté peu après, ainsi que sa compagne, et placé en garde à vue.
Sur RTL, un riverain a raconté ce qu’il avait vu et entendu. «J’allais fermer les volets, et là j’entends crier : “Oh non pas ça !” et “Au secours !” Du coup, j’ai sorti la tête du volet. Là, le monsieur a tiré sept coups : quatre coups en face sur la dame qui criait “Au secours !”, en fait, et trois coups dans la rue à côté. Et quand le monsieur a fini de tirer le troisième coup, il s’est enfui dans la rue juste à côté», a t-il expliqué. «J’ai tremblé en descendant. Mais c’était pour essayer de sauver s’il y avait quelqu’un à sauver. J’ai vu le monsieur partir, donc je me suis dit : “Il ne va pas revenir…” Je suis descendu, au cas où s’il y avait besoin d’aide. Mais il n’y avait plus rien à faire», a encore raconté ce témoin.
Manuel Valls annonce un hommage de la nation
Les deux gendarmes étaient âgées de 29 et 35 ans. L’une d’elle avait pour compagnon un gendarme de Salon-de-Provence. L’autre était la mère de deux petites filles de 5 et 13 ans, ont indiqué la préfecture et les militaires. Manuel Valls s’est rendu sur place, lundi midi, et a rencontré les familles des deux femmes. «La nation aura sans doute l’occcasion dans les jours qui viennent de rendre hommage à ces deux gendarmes, et de leur témoigner sa reconnaissance», a déclaré le ministre de l’Intérieur lors d’une conférence de presse à la mairie de la commune. Selon lui, «ce drame, sans précédent dans l’histoire de la gendarmerie, vient rappeler le caractère souvent périlleux et imprévu des missions de sécurité publique que les gendarmes sont amenés à accomplir, quotidiennement, en zone rurale, sur l’ensemble du territoire».
Dans la matinée, François Hollande avait également réagi. «C’est avec une très grande émotion que j’ai appris le meurtre de deux femmes gendarmes, cette nuit à Collobrières», explique le président de la République dans un communiqué, ajoutant: «A travers ce drame, c’est la République qui est atteinte». Le président PS du Sénat, Jean-Pierre Bel, a lui exprimé «sa profonde émotion» devant ces «crimes odieux»
Le FN pose la question de la récidive
« Le meurtre de deux femmes gendarmes dans un village varois par un individu déjà connu des services de police et de gendarmerie pose une fois encore la dramatique question du sentiment d’impunité qui règne chez les criminels et qui nourrit le phénomène de récidive » écrit ce lundi le FN dans un communiqué. « Une fois encore, une fois de trop, l’homme qui a assassiné deux représentantes des forces de l’ordre se retrouvait en liberté alors qu’il était déjà connu pour des actes de violence et de délinquance », ajoute le parti d’extrême droite.
La mère du tueur présumé : «J’aurais préféré qu’il me tue avant»
«Mon fils est devenu fou». Djamila Boumezaar est la mère d’Abdallah, l’homme qui a reconnu avoir tué par balles les deux femmes gendarmes. Contactée par le parisien.fr, la femme, qui vit dans une cité de la Seyne-sur-Mer (Var) apparaît complètement effondrée. Son fils de 30 ans avait déjà été condamné par le passé pour infraction à la législation sur les stupéfiants et vols avec violences. Djamila aussi été victime de la violence de son propre fils, en mai dernier. «Il m’avait fracassé contre une porte. J’ai donc porté plainte. Et puis il a été jugé la semaine dernière. Je ne comprends pas pourquoi le juge l’a laissé en liberté. Parce qu’il est fou», raconte-t-elle, entre deux sanglots. «J’aurais préféré qu’il me tue. Comme ça il aurait été arrêté et jamais les deux femmes gendarmes n’auraient perdu la vie. Je suis si triste pour elles et pour les deux petites filles», poursuit péniblement Djamila. Abdallah venait d’être condamné à une peine de sursis-mise à l’épreuve pour violences commises sur sa mère. C’était le 13 juin.
LeParisien.fr avec AFP
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